Inspiré d'un extrait de L'éducation sentimentale où Flaubert décrit une rencontre avec précision.
J’accompagnais ma sœur pour la première fois à
la représentation d’un ballet classique à l’Opéra Garnier. Je craignais de m’y
ennuyer et gardais mon portable à la
main afin de pouvoir taper quelques messages à mes amis pendant le spectacle.
Les lumières s’éteignirent, l’orchestre
s’installa dans la fosse, le rideau rouge s’ouvrit et je la vis, là, seule au
milieu de la scène, le projecteur enveloppant sa silhouette d’un halo bleuté.
Elle était le cygne blanc majestueux et gracieux. Longue, fine dans son tutu
immaculé qui lui donnait l’air d’un ange, aérienne et fragile, elle semblait
irréelle. Je ne pouvais détacher mon regard de ce corps juvénile. J’empruntai les jumelles de ma sœur afin de détailler celle qui m’attirait tant. Un visage
mince, des cheveux noirs en chignon maintenus par des plumes blanches, un long
cou et un port de tête altier ; elle avait une allure folle ! Ses
épaules et ses omoplates d’un blanc laiteux m’attendrirent. J’aurais aimé
suivre le trajet de ses veines qui bleuissaient le grain de sa peau.
A ce stade, je dus déglutir et me ressaisir
avant de continuer. Je fermai les yeux et essayai de me concentrer sur la
musique. Cette ballerine me bouleversait !
Quand je repris mon inspection, elle mimait la
dernière scène du ballet, celle de la mort du cygne et je crus sentir son cœur
palpiter à travers l’étoffe de sa tenue.
Les derniers soubresauts sur les pointes, les ultimes débats de ses bras avant
la chute finale eurent raison de moi. Fébrile, je fus incapable d’applaudir.
J’étais prêt à monter sur scène pour soulever son corps si frêle et la
réveiller d’un baiser de prince charmant !
Sylvie
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